Priam, le jeune pompier

Je suis né au fin fond du Texas dans une famille très croyante, second enfant de la famille puisque ma sœur jumelle est née quelques minutes avant moi. J’ai toujours été proche de ma sœur, fusionnel, quand l’un de nous n’allait pas bien, le deuxième le ressentait. On se réconfortait l’un l’autre, même tout petit. On a été élevé dans un ranch, nos parents avaient un élevage de bétail de trois cents têtes. On voyait rarement notre père, il avait toujours du boulot à faire et surtout, il était un peu déçu. Lui qui voulait un garçon, il avait eu deux filles, eh oui, je n’ai pas toujours eu ce corps de garçon. Cela dit, enfant, j'étais déjà bien différent de ma sœur, dès que je le pouvais je me coupais les cheveux pour les avoir aussi courts que les garçons avec qui j’étais à l’école. Ça a rendu ma mère folle plus d’une fois d’ailleurs. Je refusais aussi les robes et tout ce qui pouvait me définir comme une petite fille. Je ne comprenais simplement pas pourquoi j’étais différent des garçons de mon âge. J’étais de ce fait un enfant un peu difficile, colérique car incompris tout simplement.

L’école a été compliquée, on était dans le privé, dans une école catholique. Mes problèmes de comportements n’aidaient pas, le fait que j’ai les cheveux courts non plus et je refusais de porter l’uniforme réservé aux filles, je voulais à tout prix le pantalon et la chemise. Ça m’a valu de belles remontrances, après une vraie crise de nerfs, nos parents nous ont mis dans le public et ça a été un peu plus facile. Je ne dis pas que je n’ai pas reçu de nombreuses critiques déjà à l’époque, mais je pouvais m’habiller comme je voulais déjà. Être un peu plus moi. J’ai essayé à cette époque de parler de ce que je ressentais au plus profond de moi, de ne pas être dans le bon corps, mais la seule réponse de mes parents, ça a été de me faire examiner par un prêtre, encore un peu et je me faisais exorciser.. Heureusement que ma soeur, elle, elle m’a toujours compris, elle ne m’a jamais jugé et elle a toujours tout fait pour que je me sente au mieux. Il n’y avait qu’elle, je sais bien que pour tous les autres j’étais juste bizarre, voire dangereux. Mes parents ne voulaient plus m’entendre parler de toutes ces âneries alors je me suis tu pendant longtemps.

Au lycée j’ai fait la rencontre de Aaron. Un garçon parfait, intelligent, infiniment gentil et incroyablement beau. Il aimait les filles alors quittes à être coincé dans ce corps autant jouer le rôle à fond.. J’ai essayé d’être une fille à cette époque, j’ai demandé à ma sœur d’apprendre à me maquiller, à m’habiller, mais je voyais bien qu’au fond, elle ne voulait pas de cette vie pour moi. Elle ne voulait pas que je me mente à moi-même, elle savait à quel point je souffrais de tout ça. J’étais heureux avec Aaron, du moins je le pensais vraiment. J’étais dingue de lui, mais le mensonge que je gardais en moi m’a rendu malade. J’ai commencé à avoir des gros troubles alimentaires, j’ai perdu énormément de poids en peu de temps. J’ai fait un séjour à l’hopital et c’est une discussion avec Cléo qui a fait que j’ai décidé de reprendre tout en main. J’ai rompu avec Aaron parce que c’était trop dur de l’affronter, de lui dire que depuis longtemps je sais être une personne transgenre, mais que je ne lui ai jamais dit. Ca a été infiniment douloureux de renoncer à lui, mais c’était la seule façon que j’avais de renouer avec moi en premier lieu.

Je suis parti pour Los Angeles avec ma sœur et elle a vraiment été exceptionnelle avec moi. Elle a été là pour toutes mes démarches, mes peines et mes victoires. J’ai choisi de m’appeler Priam, j’ai attaqué un traitement hormonal assez rapidement et ça a été un véritable départ pour moi. Ça n’est pas toujours facile, mais j’ai appris à m’aimer moi avant de demander aux autres de le faire. Je suis resté plutôt dans l’ombre pendant un temps, faisait des petits boulots comme serveur ou baby-sitter. Puis quand j’ai eu assez confiance en moi et en mon nouveau corps, j’ai passé le concours pour devenir pompier. J’y suis parvenu et je vais enfin intégrer ma caserne, je dois dire que j’en suis très heureux. Ma transition médicale est toujours en cours, mon hystérectomie est prévue d'ici à quelques mois puis viendront encore d’autres opérations, chaque chose en son temps. Pour l’instant je vis ma vie d’homme et c’est déjà une grande satisfaction et victoire pour moi.